Garantie universelle des loyers (Gul) et encadrement des loyers sont les deux mesures phares de la loi Alur portée par la ministre Cécile Duflot. Comme les deux premiers sujets, le volet urbanisme visant le transfert aux intercommunalités des compétences en matière d'urbanisme a été à l’origine de débats parlementaires musclés.
Au gré des débats et face à un accueil plus que réservé des professionnels, des propriétaires et même des locataires, le projet de loi a beaucoup évolué depuis sa présentation en juin 2013. Voté par le Sénat le 31 janvier 2014 en deuxième lecture, le texte doit faire l'objet d'une commission mixte paritaire - sept sénateurs et sept députés- chargée d’élaborer un texte commun aux deux chambres dans le but d’une adoption définitive de la loi fin février.
ALUR : des objectifs ambitieux
Le projet de loi dit ALUR porté par la ministre du Logement Cécile Duflot vise :
« à réguler les dysfonctionnements du marché, à protéger les propriétaires et les locataires, et à permettre l’accroissement de l’offre de logements dans des conditions respectueuses des équilibres des territoires ».
Pour servir ce projet ambitieux, le texte prévoit de nombreux moyens mis au service de ces objectifs. On citera l’encadrement des loyers, la mise en place d’une garantie contre les impayés, une meilleure information des candidats acquéreurs ou encore un meilleur encadrement des professions immobilières.
Le mauvais accueil réservé par les propriétaires-bailleurs, promoteurs immobiliers et même parfois locataires à la grande majorité des mesures sont à l’origine de plusieurs reculs gouvernementaux à l’image de celui sur l’une des mesures phare connu sous le nom de GUL: la garantie universelle des loyers.
La Garantie Universelle des Loyers (GUL) ou comment régler le risque d’impayés ?
Le sujet du risque d’impayés a été traité dans le projet de loi avec le principe de la Garantie Universelle des Loyers. A la base de la mise en place de ce dispositif, on trouve l’idée selon laquelle il n’y a pas de raison pour que les bailleurs ne mettent pas sur le marché des logements vacants, s’ils savent que les loyers seront payés. L’autre objectif de la GUL est de limiter les expulsions grâce à une détection plus rapide des impayés.
Cécile Duflot, a cédé sur le financement de la GUL. Initialement, ce dispositif qui permettra aux bailleurs de toucher à partir du 1er janvier 2016 leurs loyers en cas d'impayés, devait être financé à parts égales par le bailleur et le locataire. Finalement, ce système, dont le coût est évalué à 400 millions d'euros par le gouvernement sera payé par l'État. Cette garantie ne sera plus obligatoire et sera en fait une assurance publique contre les loyers impayés.
Finalement le bailleur aura le choix entre la GUL ou le recours à une caution classique. Mais comment convaincre les propriétaires d’opter pour la GUL ? Gratuite (par rapport à une assurance privée), elle permettra une couverture pour une durée de dix-huit mois et pour un montant plafonné au loyer médian du quartier. Cécile Duflot évoque une procédure d’indemnisation rapide.
Concrètement le bail locatif comporterait la GUL par défaut. Au bailleur de spécifier qu’il la refuse.
Si ce revirement a été obtenu, plusieurs questions subsistent. C’est désormais le coût pour la collectivité qui est mis en cause ainsi qu’une mise en œuvre qui risque d’être moins simple qu’il n’y parait avec une agence d’État et la mise en place d’un réseau d’opérateurs agréés… L’établissement du loyer médian afin de calculer le plafond d’indemnisation pose aussi de nombreuses questions, ainsi que le côté déresponsabilisant pour le locataire… Des précisions sont attendues.
Si elle est adoptée, cette mesure entrerait en vigueur en 2016.
Encadrement des loyers et loyer médian de référence
Cet autre volet du projet a également été très contesté. En encadrant les loyers, la loi entend remédier au problème de la maîtrise de leur coût là où la situation du logement est tendue. Dans ces zones, le rôle reviendra au préfet de déterminer par décret un loyer médian de référence et ce, chaque année. L’encadrement se fera avec un loyer plafond -fixé au loyer médian de référence majoré de 20 %- que les propriétaires ne pourront pas le dépasser.
Il y aura un loyer plancher (inférieur de 30 % au loyer médian) en deçà duquel le propriétaire pourra demander une hausse de loyer.
La loi prévoit un assouplissement au moyen du « complément de loyer exceptionnel ». Il permettra d’augmenter le loyer de référence des logements présentant une particularité (de situation, de confort) mais que le locataire pourrait contester auprès de la commission départementale de conciliation.
Les frais annexes au loyer encadrés
Toujours dans le but de contenir les charges locatives, la loi s’attaque aux frais annexes au loyer, parmi lesquels figurent les frais d’agence (frais de visites, constitution du dossier).
Le projet de loi ALUR veut rééquilibrer la répartition des frais d’intermédiation, actuellement essentiellement portés par le locataire. Nouveauté : le nouveau texte prévoit le partage entre le locataire et le propriétaire des prestations bénéficiant aux deux parties. Une partie du coût des visites et de la constitution du dossier serait transférée au propriétaire, à égalité avec le locataire.
Ensuite les honoraires seront plafonnés par décret et les documents administratifs, juridiques et commerciaux entre les deux parties devraient être standardisés pour plus de clarté.
La fronde des professionnels de l’immobilier
Nul besoin de rappeler combien cette loi aura été combattue par les professionnels de l’immobilier ou leurs représentants.
Pour les propriétaires, le fait d’imposer une participation aux frais constitue une amputation des revenus. Mais le Gouvernement pouvait craindre que le propriétaire ne répercute au locataire toute nouvelle taxe ou dépense, en partie ou en totalité, en augmentant le prix du loyer. Pour contrer ceci, il y a la mise en place d’un encadrement strict des loyers…
Pour les promoteurs immobiliers le contrôle des loyers, alors que les outils de mesure de ces loyers ne sont pas fiabilisés, constitue un frein pour les investisseurs potentiels donc les recettes deviennent incertaines.
Si plusieurs mesures sont en faveur des locataires, certaines associations de locataires sont montées au créneau lors de la présentation de la GUL puisque revenait dans le projet initial, au locataire de payer une prime.
Mais le Gouvernement a amélioré sa copie et récemment évoquant l’obligation de formation des professionnels que prévoit le texte, Jean-François Buet, Président de la FNAIM s’exprimait ainsi :
«Il faut reconnaître que les discours sur le projet de loi ALUR, très critiques sur plusieurs dispositions, ont fini par faire oublier que le texte comportait des avancées de premier plan ».
Le plan local d'urbanisme intercommunal
La troisième mesure phare du projet concerne le transfert aux intercommunalités des compétences en matière d'urbanisme, qui a occasionné un bras de fer entre députés et sénateurs.
Les maires souhaitent conserver la main sur le plan local d'urbanisme qui sert à définir les zones constructibles.
Rendez-vous le 11 février 2014. Si députés et sénateurs n’arrivent pas à se mettre d’accord lors de la Commission mixte paritaire le dernier mot reviendra à l’Assemblée Nationale.