Politique des taux négatifs oblige, une banque commerciale de la zone euro qui place ses réserves de liquidités auprès de la Banque centrale européenne (BCE) doit payer au lieu d’être rémunérée.
Une banque coopérative allemande la Raiffeisenbank, a annoncé cet été répercuter ce coût à compter du 1er septembre en taxant les dépôts de ses clients au-delà de cent mille euros, à hauteur de 0,4 %.
Si elle concerne des niveaux élevés de dépôt, cette décision a beaucoup fait parler d’elle dans le monde bancaire européen. Parmi les alternatives au dépôt bancaire, de nombreux Allemands recourent désormais au coffre-fort. Les ventes y explosent outre Rhin !
L’impact de la politique de la BCE
Toutes les réserves d’une banque ne sont pas compensées par des crédits et ces montants sont alors placés auprès de la BCE. La banque doit désormais payer pour cela…
C’est en 2014 que la BCE a décidé non seulement de ne plus rémunérer les réserves excédentaires confiées par les banques mais aussi de leur faire payer ce dépôt, au taux de 0,2 % à l’époque.
Déposer ses liquidités « dans le coffre » de la BCE coûte aujourd’hui 0,4 % à une banque commerciale.
La BCE espère ainsi inciter les banques à faire circuler l'argent dans le circuit économique, à prêter plus aux ménages et aux entreprises plutôt que de le stocker.
Quand les banques décident de répercuter ce coût sur les clients
Pour lutter contre l’impact des taux négatifs et de la « taxation » de la BCE, les banques ont deux solutions principales.
La première consiste à limiter les montants déposés en prêtant davantage. L’autre consiste tout simplement à répercuter les coûts des taux négatifs, en taxant directement les dépôts des épargnants ou en augmentant les tarifs…
Si certaines banques européennes facturent déjà les dépôts, la pratique était réservée aux comptes des clients professionnels, investisseurs ou entreprises et concernait les très gros dépôts. Les ménages n’étaient pas encore touchés.
Mais cet été, la banque allemande Raiffeisen a annoncé appliquer à compter du 1er septembre des taux négatifs sur les comptes courants, au taux de 0,4 % au-delà de 100 000 euros de dépôts.
Pour éviter la crainte des déposants allemands, la Deutsche Bank, première banque allemande, a déjà annoncé ne pas vouloir recourir à cette taxation.
Les Allemands redécouvrent les coffres forts
Malgré la baisse des taux d’intérêts et donc de rémunération de leurs placements, les Allemands ont longtemps préféré garder leur argent sur des comptes d’épargne, y voyant l’avantage de la sécurité et de la disponibilité.
Mais leur confiance s’est érodée et les taux d’intérêts négatifs les ont amenés à se mettre à la recherche d’une alternative, qui a pris pour certains la forme de l’acquisition d’un coffre-fort !
Selon le Wall Street Journal, les épargnants allemands s’éloignent de leurs caisses d’épargne, retirent leurs dépôts des banques pour y préférer la sécurité des coffres forts. Toujours selon le quotidien américain, de nombreux Allemands sont désormais sur des listes d’attente pour obtenir la location d’un coffre-fort et d’autres préfèrent donc recourir à l’installation d’un coffre-fort à domicile.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : plusieurs fabricants de coffres forts annoncent des hausses à 2 chiffres des ventes pour le premier semestre 2016 par rapport au 1er semestre 2015 et même de 25 % pour Burg-Waechter KG, le plus grand fabricant de coffres-forts ignifuges du pays.
En France : vers une sorte de taxation indirecte des dépôts
Démotivés par la faible rémunération de placements à taux fixe, les épargnants français déposent toujours davantage sur leurs comptes courants et les dépôts sur les comptes courants sont très importants.
Les particuliers ont commencé à constater une hausse généralisée des tarifs de leur banque de détail. Comme dans d’autres pays européens, elles ont en effet reporté indirectement l’impact des taux négatifs en ayant recours à la facturation de frais de tenue de comptes et services. Les clients bancaires -ceux qui ont choisi des banques en ligne restent toutefois épargnés par le phénomène- payent ainsi des services autrefois gratuits…
Crédit photo : mbbirdy