La modulation des allocations familiales selon les revenus a donc été adopté lundi 1er décembre avec le Projet de financement de la Sécurité sociale pour 2015 (PLFSS). Cette mesure prendra effet le 1er juillet 2015. Elle doit permettre une économie de 800 millions par an à partir de 2016. Cette économie est destinée à participer au financement du pacte de responsabilité avec les entreprises.
La modulation des allocation familiales devrait concerner 12 à 13 % des familles d’au moins deux enfants. En faites-vous partie ? Décryptage.
La fin de l’universalité des Allocations familiales ?
La mise sous condition de ressources des allocations familiales est sans doute la mesure qui a fait le plus débat dans l’opposition mais également dans la majorité où elle ne faisait pas l’unanimité.
Si certains ont évoqué la fin de l’universalité des allocations familiales, le rapport Fragonard - publié en mars 2013 - qui soutenait le principe d’une modulation selon les revenus expliquait que dans ce schéma :
« on conserverait le principe d’universalité des allocations familiales : toutes les familles ouvriraient droit à ces allocations mais leur montant diminuerait avec le revenu ».
Actuellement en fonction du nombre d’enfants, toute famille touche un montant mensuel de :
- 129,35 euros pour deux enfants ;
- 295,05 pour trois ;
- 460,77 pour quatre ;
- 165 euros par enfant supplémentaire.
Le tout majoré à l'adolescence.
Baisse des allocations familiales : quelles seront les familles concernées ?
Les allocations familiales deviennent modulables en fonction du niveau des revenus du foyer fiscal.
Elles seront :
- divisées par deux à partir de 6 000 euros de revenu net mensuel pour deux enfants
- divisées par quatre au-delà de 8 000 euros de revenu net mensuel pour deux enfants
Ces seuils augmenteront de 500 euros par enfant supplémentaire.
Concrètement, un couple avec deux enfants dont les revenus sont supérieurs à 6 000 euros nets par mois va voir le montant des allocations passer de 129,35 euros à 65 euros - soit la moitié de la somme actuelle. Au-delà de 8 000 euros nets de revenus, le même couple ne touchera que 32,50 euros mensuels.
Compte tenu du seuil de 500 euros par enfant supplémentaire, un couple ayant quatre enfants et dont les revenus sont de 7 000 euros nets verra le montant de ses allocations divisisées par deux.
Cette mesure concernerait 12 à 13 % des familles comptant au moins deux enfants.
La majoration pour âge, est également concernée selon un barème qui sera défini par décret.
Un dispositif de lissage pour éviter les effets de seuils
Les effets de seuil devraient être lissés afin que les familles qui dépassent ces montants de quelques euros ne perdent pas un montant d'allocation supérieur au dépassement du seuil.
Ce dispositif de lissage prendra la forme d’un complément d'allocations d'un montant diminuant au fur et à mesure.
« Un complément dégressif est versé lorsque les ressources du bénéficiaire dépassent l’un des plafonds, dans la limite de montants définis par décret. Les modalités de calcul de ces montants et celles du complément dégressif sont définies par décret » peut-on lire dans le texte législatif.
Application de la réforme
La nouvelle grille s'appliquera au 1er juillet 2015.
Pour le moment, la Caisse nationale d’Allocations Familiales doit notamment adapter ses systèmes d'information pour appliquer le nouveau barème. D'après Les Échos, si elle dispose déjà de nombreuses données collectées pour d’autres allocations soumises à condition de ressources, « il reste 2,5 millions de ménages dont la situation n’est pas connue ».
Les niveaux des plafonds de ressources, qui varient en fonction du nombre d’enfants à charge, seront révisés conformément à l’évolution annuelle de l’indice des prix à la consommation, hors tabac.
Y a-t-il un risque d’inconstitutionnalité ?
L’idée de soumettre les allocations familiales à un plafond de ressources, n’est pas nouvelle. Lorsque en 1997, le Gouvernement Jospin avait prévu un dispositif similaire, l’opposition de droite avait demandé l'avis du Conseil constitutionnel.
Ce dernier avait affirmé dans sa décision du 18 décembre 1997 que :
"l'attribution d'allocations familiales à toutes les familles, quelle que soit leur situation, ne peut être regardée comme figurant au nombre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République mentionnés par le Préambule de la Constitution de 1946". Ces lois ne s'opposaient pas à ce que "le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des motifs d'intérêt général".
Autrement dit, il n’y aurait pas rupture d'égalité lorsque des personnes en situation différente sont traitées de manière différenciée.