Traditionnellement, les éditeurs de jeux voyaient leurs ventes pilotées principalement par la sortie de consoles de nouvelles générations : PS, PS2, PS3, PS4... Depuis la crise de 2008, la multiplication des formats de jeux (tablette, smartphone, TV) en plus des supports traditionnels (PC, console) a conduit fabricants à chercher à prolonger la durée de vie de leurs consoles en développant des accessoires comme les détecteurs de mouvements.
Quant aux éditeurs, ils ont fait le choix de ne pas trop innover en se contentant d’allonger la durée de vie de leurs franchises, un peu comme au cinéma, en créant des séries.
L’année 2014 marque le début d’un retour à la croissance pour le marché. Cette croissance est tirée par les ventes de consoles et l’arrivée de la dernière génération (PS4, Xbox One) et par la mise sur le marché de nouvelles franchises (Watch Dogs).
Cette période s’est en outre accompagnée d’une vague de concentration dans l’industrie : aujourd’hui les 10 plus gros éditeurs de jeux vidéo contrôlent 86% du marché mondial. Il s'agit de Electronic Arts, Activision Blizzard, Take-Two Interactive, Nintendo, Ubisoft, Sony, Warner Bros Interactive, Microsoft, Disney et Square Enix .
A moyen terme, l'industrie du jeu vidéo doit prendre le virage du Cloud gaming
Aujourd'hui, le défi le plus important à relever pour l'industrie du jeu vidéo, c'est la dématérialisation avec le développement de magasins en ligne par les fabricants de consoles, de plates-formes de téléchargement jusqu’au jeu « dans le nuage » (« cloud gaming »).
Pour les éditeurs, il y a un intérêt : disposer par ce biais de revenus plus récurrents (abonnements), voire obtenir une rentabilité plus élevée grâce à une meilleure compréhension des besoins du marché (analyse de données).
Le cloud gaming est fondé sur la technologie du streaming : au lieu d’être installés sur une machine localement, les jeux sont exploités à distance sur des serveurs.
Cette tendance est durable et prendre d’autant plus d’ampleur que les Internautes auront accès à des débits de transfert de données de plus en plus rapides. Elle représente une menace pour les fabricants de consoles (disparition des machines et accessoires dans un scénario noir), et sans doute un gain pour les éditeurs. Selon certaines estimations, ces derniers pourraient récupérer jusqu’à 15 points de pourcentage de marge brute dans un modèle de distribution de type AppStore où 70 % du prix payé revient à l’éditeur, 30 % à la plate-forme de distribution, contre une répartition 55/25/20 entre éditeur/détaillant/fabricant de console respectivement.
Les frais de structure pourraient évoluer : plus de R&D affectée aux jeux et un partage plus important des frais de marketing entre la plate-forme de distribution et l’éditeur qui pourra se concentrer sur l’innovation produit.
À court terme, elle dépend toujours du succès de ses blockbusters
A plus court terme, la dynamique du secteur dépend de la mise sur le marché de jeux dits « AAA », ou un blockbuster, c’est-à-dire un jeu qui a requis de gros budgets de développement (rappelons que le chiffre d’affaires de l’industrie du jeu dépasse celui du cinéma) et doit générer d’importants volumes d’activité.
Parmi ces jeux, on trouve des licences comme Watch Dogs, Far Cry, Assassin’s Creed (UbiSoft), Call of Duty, Destiny (ActivisionBlizzard), GTA (Take-Two), FIFA (EA) ou Halo (Microsoft).
Le report d’un jeu peut avoir des conséquences non négligeables sur le parcours boursier d’un éditeur. Pour mémoire, Ubisoft avait plongé en Bourse fin 2013 après l’annonce du report du lancement de Watch Dogs. Ce n'est le plus souvent qu’une réaction épidermique qui est finalement effacée avec le temps (si le jeu en question a vraiment les qualités d’un blockbuster).
L’autre défi pour les éditeurs est la maîtrise de circuits de distribution plus complexes - en grande partie à cause du développement des ventes dématérialisées.
Pour être sûr de participer au développement du marché - qui repose encore aujourd’hui pour bonne partie sur la sortie de nouvelles générations de consoles de jeux - les éditeurs doivent investir beaucoup plus et diversifier leur offre, en privilégiant les franchises développées en interne.
La contrepartie de cette dynamique est l’augmentation du point mort et l’obligation de ne pas « rater » les sorties de nouveaux titres, en particulier lorsque leur développement a coûté plusieurs dizaines de millions d’euros.
Cela justifie en partie l’augmentation de la taille critique pour être un acteur de premier plan mais cela explique aussi la volatilité du parcours boursier et de la rentabilité des sociétés du secteur.