Dans son livre Le cygne noir, l’ancien trader Nassim Nicholas Taleb écrit que les événements les plus improbables finissent par se produire. Depuis le krach d’octobre 1987, personne n’avait prévu la guerre Irak-Koweït (août 1990), l’attentat contre le World Trade Center (septembre 2001), la crise des prêts hypothécaires à risque aux Etats-Unis (juillet 2007), la faillite de Lehman Brohers (septembre 2008), le poids de l’endettement de la Grèce (juillet 2011), la pandémie de Covid-19 (mars 2019) ni l’invasion de l’Ukraine par la Russie (février 2022). A chaque fois, les marchés ont violemment corrigé, avant de rebondir.
Puisqu’il est impossible de prévoir l’avenir, il convient de bien diversifier ses avoirs, entre les actions, les obligations, l’immobilier et l’or, notamment, en conservant jusqu’à 20 % en liquidités (comme marge de manœuvre). Une ligne de défense efficace consiste à programmer aussi une épargne boursière à intervalles réguliers. Ce qui suppose d’avoir un horizon de placement suffisamment éloigné. "Historiquement, explique dans une récente note Jocelyn Jovène, rédacteur en chef de Morningstar France, les conflits armés sont sources de tension pour les investisseurs. Ceux-ci préfèrent protéger leurs actifs et vendre ceux qui sont le plus liquides, à commencer par les actions. Est-ce que vendre dans un mouvement de baisse est une bonne chose ? A notre avis, non."
Savoir être contrariant
François Monnier, rédacteur en chef de l’hebdomadaire Investir, pense même que sortir du marché serait la pire des décisions. "Il convient de ne jamais vendre ses actions, si ce n’est partiellement pour prendre des bénéfices lorsqu’elles ont bien monté ou pour réduire son exposition en cas de doute", souligne-t-il dans son éditorial du 19 mars. Depuis un demi-siècle, d’après la banque Goldman Sachs, quelqu’un qui aurait conservé de nouvelles positions durant un an, cinq ans et dix ans aurait respectivement été gagnant dans 78 %, 88 % et 97 % des hypothèses.
A contrario, alors que l’effondrement des cours constitue généralement une opportunité, il est difficile d’acheter des valeurs qui chutent. Beaucoup se disent qu’elles ne corrigent pas sans raison. Garder son sang-froid n’est pas évident. La perte apporte plus de souffrance que le gain ne procure de satisfaction. La plupart des épargnants préfèrent donc une rentabilité faible à une plus-value aléatoire. Une étude d’Invesco a pourtant montré qu’en Bourse les périodes de hausse sont plus nombreuses et durent plus longtemps que les périodes de baisse.
Clémence Dachicourt, analyste chez Morningstar, a rappelé dans une conférence que "le pire ennemi de l’investisseur n’est autre que lui-même" et que "la pression des marchés fait perdre l’indépendance d’esprit". Il faut acheter au son du canon (quand tout va mal) et vendre au son du clairon (quand tout va bien). Et non l’inverse !
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