Quelles réflexions le comportement des marchés vous a-t-il inspiré ?
En février 2020, il y a eu un catalyseur, l’épidémie de Covid-19, que personne n’avait attendu. L’apparition de ce "cygne noir" – événement imprévisible lourd de conséquences – a provoqué une fermeture des économies. La production s’est arrêtée. L’offre s’est effondrée. Mais, grâce aux mesures prises par les gouvernements, la demande a été maintenue à l’étiage. L’absence de croissance s’est traduite par un recul des perspectives de profits des entreprises, ce qui a entraîné un plongeon des marchés financiers. Cela dit, il n’y a pas eu de destruction de capital productif ni de faillites en chaîne. Pour compenser les effets de la crise sanitaire, les banques centrales aussi se sont montrées généreuses. Si bien que les marchés ont pris leur envol à partir de fin mars, dès que les politiques publiques sont devenues très accommodantes.
Comment appréciez-vous la situation actuelle ?
L’offre de monnaie étant supérieure à ce qui est nécessaire à l’économie pour fonctionner, le surplus va dans les marchés. Les actifs (immobilier, actions, non-coté, crypto-monnaies, œuvres d’art…) sont des "buvards" qui absorbent la liquidité ! Les taux d’intérêt étant très bas, cela milite en faveur des actions européennes, notamment, dont la prime de risque – qui mesure le différentiel de rentabilité par rapport aux emprunts d’Etat – est de 5 points (contre 2 aux Etats-Unis), alors que les profits anticipés y sont en progression.
Par ailleurs, l’inflation n’est pas menaçante. La "vraie" inflation est auto-entretenue et résulte des hausses de salaire. Or, il faudra près d’un an et demi pour retrouver le niveau d’emploi pré-pandémie. Parmi les tendances structurelles que la crise sanitaire a amplifiées, il y a principalement le télétravail et la numérisation de l’économie (comme le commerce digital). Avec, à la clé, de nouveaux gains de productivité…
Que conseilleriez-vous de mettre en portefeuille ?
L’essentiel d’une allocation d’actifs doit être investi en actions. Avec, aujourd’hui, une préférence pour la " value" ou les valeurs plus sensibles au cycle (banque, assurance, énergie…) et, dans un deuxième temps, pour la croissance (technologie…). A noter que le secteur du luxe est séduisant quelle que soit la conjoncture.
Il est, en outre, judicieux d’avoir un peu d’or, une monnaie "alternative". En diversification, il est également possible de s’intéresser aux infrastructures et au non-coté. Vu le poids des déficits budgétaire et commercial aux Etats-Unis, le dollar devrait s’orienter tendanciellement à la baisse. Il faut donc protéger ses positions libellées en billet vert ou acquérir des parts de fonds d’actions américaines couverts contre le risque de change. Les obligations souveraines, elles, ne sont pas attrayantes, car leurs rendements sont trop faibles.
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