Le contexte actuel que nous connaissons est inédit et ses nombreux impacts économiques et sociaux encore peu prévisibles à moyen terme. C’est donc à juste titre que pour gérer leurs placements, les épargnants s’interrogent sur les conséquences de cette crise et sur le comportement à adopter. Flux de l’épargne, tendances, niveaux des fluctuations et de valeur de nombreux actifs devraient dépendre de l’importance et de la durée de la récession. Comment les comportements des épargnants pourraient-ils évoluer dans les mois à venir et à plus long terme ?
Crise sanitaire de la Covid-19 : un contexte inédit et ses incertitudes
Inédites dans le passé, les mesures d’injections de liquidités par les Banques Centrales, les mesures budgétaires des gouvernements se sont montrées exceptionnelles mais l’incertitude subsiste quant à la durée de la crise sanitaire et à l’ampleur de ses impacts sur l’économie et les marchés.
Le premier constat lors de la période de confinement est la hausse de l’épargne avec tout d’abord une forte hausse des dépôts bancaires dès le mois de mars. Confinement et baisse de la consommation ont amené de nombreux Français à épargner davantage, à des niveaux très supérieurs à la période qui précédait.
A chaque crise des marchés financiers, les questions sont les mêmes : faut-il sécuriser son épargne et arbitrer vers des actifs moins risqués ? Ne rien faire et se contenter d’attendre une remontée des marchés ou profiter des creux de marchés pour bénéficier d’un rebond ? L’histoire montre que les épargnants ont tendance à se retourner alors vers les actifs les moins risqués. Le raisonnement qui conduit à "vendre" quand les marchés sont hauts et "investir" quand les marchés sont bas est souvent peu appliqué par les épargnants.
Les impacts sur les placements varient selon les marchés, les produits d’épargne et les réactions des investisseurs. Selon leur niveau d’aversion au risque, certains y voient des occasions d’investir ou de se renforcer tandis que d’autres préfèrent attendre des jours meilleurs… ou encaisser leurs pertes.
Les placements financiers en actions pour le long terme
Si les épargnants doivent régulièrement vérifier l’opportunité de leurs choix et l’adéquation des produits choisis à leur profil de risque, c’est souvent lors de périodes de turbulences qu’ils sont amenés à tirer des enseignements. Pour le choix d’un placement, l’horizon d’investissement et le profil de risque acceptés doivent rester des critères primordiaux.
Pour les actions logées dans un compte-titres ou un PEA ou investies en unités de compte dans un contrat d’assurance-vie, il est important de garder à l’esprit qu’elles connaîtront toujours des variations à la hausse ou à la baisse qui peuvent se révéler de très grande ampleur en période de crise. Si l’objectif reste de long terme et que le produit est adapté au profil de risque de l’épargnant, la performance doit s’évaluer sur longue période.
Ceux qui ont connu les grandes crises boursières précédentes savent que les ventes de panique conduisent souvent à manquer le rebond qui suit. Il faut savoir voir dans les forts replis de marchés des points d’entrée d’investissements progressifs, quand on garde une optique de long terme et que l’on accepte des pertes en capital. Il ne faut pas avoir besoin de mobiliser cet argent de façon urgente et toujours vérifier auparavant que l’on dispose d’une épargne disponible suffisante en cas de coup dur.
L'épargne de précaution a toujours la faveur des épargnants
Dépôts bancaires en hausse et flux vers les livrets d’épargne, les encours d’épargne de précaution des Français continuent à battre des records pendant cette crise sanitaire. Pourtant cette option se traduit par une absence de rémunération (comptes courants) ou des taux de rémunération qui n'ont jamais été aussi bas après la nouvelle baisse des taux des livrets réglementés, le 1er février 2020. C’est le cas aussi pour les livrets bancaires fiscalisés qui bénéficient de plafonds plus élevés.
Avec les Livrets A, le Livret de développement durable et solidaire (LDDS) et le Livret d’épargne populaire (LEP) réservé aux ménages modestes, les Français continuent à préférer une épargne garantie et disponible. Baisse de la consommation et épargne forcée pour certains mais aussi inquiétude face à l’avenir en termes d’emploi expliquent cette quête de la sécurité et de la liquidité.
Assurance vie : des impacts variables selon la nature des supports
L’assurance-vie est une enveloppe fiscale qui permet de diversifier ses avoirs grâce à l’offre variée des contrats multisupports : le fonds en euros au capital garanti et des supports plus risqués (unités de compte en actions, obligations ou encore supports immobiliers) potentiellement plus rémunérateurs sur le long terme.
Le risque et l’évolution de votre épargne pendant cette crise dépendent donc de la manière dont vous avez réparti vos avoirs en fonction de votre profil et de vos objectifs. La question ne se pose donc pas dans les mêmes termes si votre épargne est principalement investie dans le fonds en euros garanti en capital mais faiblement rémunéré ou si à l’inverse vous avez opté majoritairement pour des supports en actions. Les épargnants qui détiennent une part d’unités de compte que ce soit en gestion libre ou via un mandat de gestion s’exposent à des fluctuations à la hausse comme à la baisse et à des pertes en capital, très variables selon le niveau de risque des supports choisis. Acceptant un risque de perte en capital, ils privilégent la recherche de performance sur le long terme.
Les unités de compte investies dans l’immobilier (SCPI, OPCI) doivent s’entendre sur un long terme et offrent, elles aussi, un risque en capital à ne pas oublier. Il est trop tôt pour connaître l’impact de la crise sur leur rendement et valorisation des parts.
Quoiqu’il en soit, il faut continuer à voir dans l’assurance-vie :
- l’opportunité de se constituer une épargne dans un cadre fiscal avantageux, d’obtenir un complément de retraite ou encore d’optimiser la transmission d’un capital,
- un accès à une enveloppe qui permet d’allier performance et maîtrise du risque mais aussi souplesse.
Si la composition de votre contrat ressort bien en adéquation avec votre profil de risque et vos objectifs, les réactions « à chaud » sont à éviter dans ces contextes d’incertitude et de volatilité extrêmes. Le même raisonnement s’applique à ceux qui ont ouvert récemment un Plan d’épargne retraite individuel (PERin) proposé depuis fin 2019 car ils ont eu souvent accès à une enveloppe financière semblable à celle de l’assurance-vie.
Comptes titres, plan d’épargne en actions, plan épargne salariale
Si vous êtes détenteur d’un compte titres et plus spécifiquement d’un PEA ou un PEA-PME, vos actions ont subi depuis mars la chute des indices mondiaux, malgré le rebond opéré sur les plus bas. Les baisses sont très variables selon les secteurs d’où les opportunités d’arbitrages en fonction des attentes de rebond. Lorsque la baisse est brutale, il est souvent rapidement trop tard pour vendre. Pour les épargnants qui n'ont pas un besoin à court ou moyen terme de leur épargne, il est préférable de patienter en ayant toujours en tête que l’investissement s’envisage sur un long terme.
Si vous disposez d’épargne salariale, l’évolution de vos avoirs dépend là aussi du degré de risque que vous avez accepté lors de la répartition de votre épargne. Via des supports actions, obligations ou monétaires, il existe plusieurs profils d’investissements selon votre horizon d’investissement. Il est possible à tout moment de procéder à des arbitrages pour revoir la répartition de vos placements, toujours en fonction de vos objectifs. N’oubliez pas le cadre fiscal privilégié de l’épargne salariale : il permet après cinq ans de ne payer en cas de retrait que les prélèvements sociaux.
L’investissement immobilier : de nombreuses incertitudes
Il est difficile et trop tôt pour évaluer précisément les conséquences de la crise sanitaire de la Covid-19 sur le marché immobilier. Tout acquisition (résidence principale, résidence secondaire de plaisir ou locatif) nécessite pour l’investisseur une confiance en l’avenir notamment grâce à une bonne visibilité des revenus et donc de l’emploi. Or l’augmentation prévisible du chômage et son impact sur les revenus des ménages devrait affecter à la baisse la capacité d’achat de nombreux acquéreurs et ainsi peser sur la demande.
Si l’on prévoit aussi des évolutions de comportements (impact du télétravail ?), seront-elles visibles dès la reprise des transactions ? Les futurs acquéreurs vont-ils adopter une attitude attentiste ? Une éventuelle baisse des prix va-t-elle amener de nouveaux acheteurs ? Quid des conditions d’obtention des crédits (niveau de l’apport personnel, durée des prêts) et de la politique de taux des banques ?
L’une des spécificités expliquant l’attrait des français pour l’immobilier est que l’on peut faire un placement (immobilier locatif notamment) avec de l’argent que l’on n’a pas, via un crédit immobilier. Mais les cycles de ce secteur étant très longs, nombreux sont ceux qui oublient qu’aux périodes de hausses de prix peuvent succéder des phases de baisse de prix ou de loyers qui modifient les modèles de rentabilité. L’investissement locatif va-t-il garder le même attrait ? Des plans de relances ou dispositifs spécifiques verront ils leur apparition ?
La question de l’impact de la crise ne manque pas de se poser pour les SCPI, majoritairement investies dans de l’immobilier de commerces et de bureaux et qui perçoivent les loyers des immeubles qu’elles détiennent. Certes, la diversification du patrimoine immobilier des SCPI permet un effet dilutif en cas de difficultés financières ou défaillances de locataires. Mais c’est à plus longue échéance que les épargnants pourront connaitre la baisse réelle effective du rendement servi et du prix de la part, notamment en fonction des loyers ayant fait l’objet de reports et étalements qui auront pu être récupérés.
A noter que le secteur des valeurs foncières cotées figure parmi ceux qui payent un très lourd tribut à la crise avec des baisses (Unibail, Klépierre…) de plus de 50% depuis le 1er janvier, avec une suspension des prévisions financières et une baisse des dividendes. Les épargnants ne doivent pas oublier que l’investissement dans l’immobilier, en direct ou en SCPI doit être envisagé sur le long terme.
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