En janvier 2021 le Haut Conseil de la Sécurité financière (HCSF) avait émis plusieurs recommandations concernant les conditions d’accès au crédit pour l’habitat. Suite à une décision du 14 septembre 2021, le Haut conseil conserve ces critères mais transforme ces recommandations en obligations pour les banques. Comment ces obligations vont-t-elles changer la donne ? Quelles conséquences pour les emprunteurs et pour les banques ?
Des critères recommandés depuis le 27 janvier 2021 pour l’octroi de crédits immobiliers
Selon le Haut Conseil, le niveau élevé de l’endettement des ménages par rapport à leurs revenus peut accentuer une possibilité vulnérabilité en cas de crise. Et la forte progression du crédit immobilier s’est accompagné également d’une hausse des prix immobiliers.
C’est dans ce contexte que le HCSF avait adopté en décembre 2019 des recommandations concernant le crédit immobilier que les banques doivent respecter. Le but poursuivi : éviter que l’évolution des conditions d’octroi des prêts à l’habitat n’aboutisse à une augmentation des taux d’effort des ménages et à un allongement des durées de prêts ou maturités. L’organisme appelait donc les établissements de crédit à plus de raison et de maîtrise dans leurs pratiques d’octroi des crédits immobiliers résidentiels en France.
Puis au regard d’un premier bilan le Haut Conseil avait réactualisé cette recommandation en janvier 2021. Ainsi deux critères sont à respecter :
- un taux d'endettement maximal de 35 % avec assurance ;
- une durée limite de financement de 25 ans (et 27 dans le neuf).
Mais il existe une certaine flexibilité à hauteur de 20 % des dossiers qui peuvent être en dehors de ces critères.
Les effets sont apparus avec une baisse de la part des prêts avec des taux d’effort élevés et des maturités supérieures à 25 ans. Cet ajustement de la durée moyenne et le maintien des taux d’intérêt à des niveaux historiquement bas ont contribué à la baisse des taux d’effort individuels. Et la part des prêts non conformes à la recommandation a fortement diminué.
Les règles édictées ne vont pas changer
Les banques se sont adaptées à ces critères et ces normes étaient donc globalement appliquées depuis janvier 2021. On constate donc une normalisation des conditions d’octroi qui représentent pour le Gouverneur de la Banque de France "des règles de protection visant à rendre l'emprunt plus sûr et à éviter les dossiers de surendettement". Mais toutes les banques ne respectaient pas les règles dans les mêmes proportions.
Avec cette nouvelle décision du 14 septembre 2021, les règles ne changent pas. En effet les critères restent les mêmes à savoir le taux d'endettement maximal fixé à 35 % et la durée maximale de crédit de 25 ans. La flexibilité des banques reste la même avec un taux de 20 % de dossiers pour lesquels la banque peut déroger à ces règles.
Mais le Haut Conseil de stabilité financière a souhaité rendre contraignantes ces conditions d'octroi du crédit immobilier. Ce qui n'était jusque-là qu'une recommandation deviendra obligatoire à partir du 1er janvier 2022. Désormais, les banques qui ne les respecteront pas s’exposeront à des sanctions. En effet l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de résolution (l’ACPR) aura comme rôle de surveiller l’application de ces normes et pourra le cas échéant décider de blâmes ou encore de sanctions pécuniaires. Leurs montants n’ont pas été précisés par le HCSF.
Que peut changer la décision du HCSF de septembre 2021 ?
Ces futures obligations pourraient impacter les conditions d’obtention des crédits pour certains emprunteurs, en premier les foyers les plus modestes ou encore les primo-accédants. En pratique les plus touchés seraient ceux qui empruntent sur les plus longues durées.
Mais le Gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau a voulu parlé de "règles de protection" et non de "règles de restriction".
Que deviendra la marge de manœuvre des banques pour déroger à ces règles d’octroi du crédit immobilier ? En pratique la grande majorité des banques respectaient déjà ces recommandations d’où un taux proche de la marge de flexibilité de 20 % qui leur était laissée.
Les futurs acquéreurs de biens immobiliers peuvent s’interroger à juste titre : est-ce que cela sera bientôt plus dur d’emprunter ? Si le contexte de taux d'emprunt historiquement bas peut évoluer, il ressort que dans le passé le Haut Conseil a su démontrer qu’il savait s’adapter aux évolutions économiques et qu’il saurait également ajuster ces mesures dans le futur.
Avec des règles désormais obligatoires, les banques vont devoir porter davantage d’attention au respect de ces critères qui deviennent la règle. Pour les emprunteurs, le conseil consistera à porter davantage d’attention à la préparation du dossier.
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