Bonjour et bienvenue dans ce point marchés du mois d'avril.
Au mois de mars, ce sont naturellement les nouvelles du côté de la guerre en Ukraine qui ont dominé l'actualité. En dépit de la reprise de pourparlers en fin de mois, il n'y a toujours pas de cessez-le-feu et, tragiquement, toujours de nombreuses victimes dans la population civile.
Sur le plan économique, cette guerre renforce les tendances inflationnistes qui étaient déjà à l'oeuvre, notamment du côté des matières premières et des prix des denrées alimentaires. De notre point de vue, ce conflit marquera probablement l'entrée dans une nouvelle ère dans laquelle les taux d'inflation seront, à moyen terme, structurellement plus élevés que ceux qu'on a connus au cours des décennies passées. A court terme, les pressions haussières sur les prix vont peser sur la dynamique de croissance. On observe déjà sur la confiance des ménages en Europe, qui est à l'épicentre de cette crise, un affaiblissement très marqué de la confiance des ménages qui est tombé sur ses plus bas niveaux depuis la crise du Covid, ce qui devrait peser sur les dépenses des ménages.
Du côté des entreprises, la montée des prix des intrants va venir éroder les marges bénéficiaires des entreprises, si bien que les perspectives de profits devraient vraisemblablement se dégrader cette année. Du côté des marchés, les emprunts d'Etat n'ont pas joué leur rôle traditionnel de valeur refuge. Avec l'inflation, on a observé une remontée des taux obligataires, d'abord sur les maturités courtes où les taux d'intérêt à court terme aux Etats-Unis ont augmenté vigoureusement au cours du mois de mars, entraînant dans leur sillage les taux d'intérêt en zone euro et dans l'ensemble de l'Europe.
Du côté des taux d'intérêt à long terme, le taux à dix ans allemand a atteint 0,6% plus de 1% pour le taux à dix ans sur les emprunts d'Etat français, contre environ 2,5% sur le taux 10 ans américain. Mais malgré cette hausse des taux d'intérêt nominaux, les taux d'intérêt réels, c'est-à-dire les taux nominaux moins l'inflation, restent profondément en territoire négatif et des taux d'intérêt réels négatifs constituent toujours un support pour les placements dans les actifs risqués.
Ces derniers ont donc plutôt bien résisté, enregistrant des performances positives au cours du mois C'est notamment le cas de l'indice phare américain, le S&P 500, suivi du Topix (indice japonais). En revanche, les actions européennes, malgré le rebond en fin de mois, restent nettement à la traîne. Du côté des actions chinoises, elles demeurent en territoire négatif depuis le début de l'année en raison des contraintes réglementaires touchant les secteurs technologiques. Mais les interventions des autorités chinoises ont permis de stabiliser les marchés. Gardons en tête qu'en Chine, les nouveaux confinements vont peser sur la croissance. Nous avons revu notre prévision de croissance pour 2022 à 4%, soit un niveau quand même très en deçà de la prévision officielle de croissance qui demeure à 5,5% pour l'année 2022.
Dans cet environnement, la maîtrise de l'inflation est devenue l'objectif prioritaire des banques centrales, à commencer par la Réserve fédérale américaine (Fed) et la Banque centrale européenne (BCE). La Fed laisse entendre qu'elle va normaliser sa politique monétaire plus rapidement. On attend désormais une hausse de 50 points de base de son principal taux directeur lors du prochain comité de politique monétaire au mois de mai, vraisemblablement à nouveau 50 points de base au mois de juin. D'ici là, les taux d'inflation devraient atteindre leur pic. On s'attend à moins de pression haussière liée aux prix des matières premières dans la deuxième partie de l'année, ce qui devrait alléger la pression politique sur la Réserve fédérale américaine. C'est d'autant plus vrai qu'au second semestre, l'économie américaine pourrait enregistrer ses premiers signes d'essoufflement. La Fed va devoir trouver le bon équilibre entre le nécessaire durcissement des conditions monétaires pour ancrer les anticipations d'inflation et le durcissement des conditions financières qui en résulte, qui pourrait peser sur les actifs risqués. Ceci dit, il ne faut pas s'y tromper, la première séquence du côté de la Réserve fédérale est un durcissement de la politique monétaire, au minimum, jusqu'au mois de mai. Et ceci pourrait entraîner dans son sillage les taux d'intérêt sur les emprunts d'Etat à long terme dans les semaines qui viennent. Il y a évidemment la politique des banques centrales dont nous venons de parler, mais il y a aussi évidemment, la politique budgétaire, qui, de notre point de vue, va jouer un rôle central dans cette crise, notamment en Europe, qui est à l'épicentre de cette crise, on observe que les gouvernements européens sont en phase pour mettre en œuvre des politiques de stabilisation ciblées.
Dans cet environnement, quelles sont nos vues en matière d'investissement ?
Du côté du crédit, nous sommes devenus plus prudents sur les obligations d'entreprises en raison de la faible liquidité de ces titres, malgré des fondamentaux qui sont toujours porteurs. Nous n'anticipons pas de rebond des défauts d'entreprises.
Du côté des actions, nous mettons davantage l'accent sur la qualité des titres sélectionnés et moins sur les valeurs cycliques. Sur le plan géographique, nous privilégions tactiquement les actions américaines par rapport aux actions européennes et nous sommes tactiquement neutres sur les actions chinoises à court terme.
Nous anticipons la poursuite de la remontée des taux d'intérêt, mais nous ajustons nos portefeuilles de façon opportuniste, les emprunts d'Etat à long terme pouvant servir de valeur refuge dans les phases de turbulences financières.
En guise de conclusion, vous l'aurez compris, la combinaison de hausses de taux d'intérêt, de moins de liquidité sur les titres, de risque de ralentissement dans une phase d'incertitude, c'est une configuration qui n'est pas très porteuse pour les actifs risqués. Et nous continuons de recommander la prudence en matière de placements.
Merci de votre attention et rendez-vous lors de notre prochain point marchés.
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