Bonjour et bienvenue à ce point marchés du mois de février.
Trois sujets ont dominé l'actualité au mois de janvier. Il y a d'abord la politique monétaire de la Réserve fédérale américaine. Ensuite, les évolutions observées de croissance et d'inflation. Et enfin, sur le plan politique et géopolitique, il y a eu les tensions croissantes entre la Russie et l'Ukraine, d'une part, et, d'autre part, la réélection en Italie du président Mattarella.
Commençons par la Réserve fédérale américaine. La simple perspective de voir cette dernière retirer son soutien à l'économie a ébranlé les marchés au cours du mois de janvier. La communication de la Réserve fédérale est claire, de sorte que les marchés s'attendent désormais à une première hausse des taux d'intérêt au mois de mars et au total, sur l'ensemble de l'année 2022, à cinq hausses de taux d'intérêt. Ce début de normalisation monétaire visant à ancrer les anticipations d'inflation. Nous sommes plus circonspects sur les marges de manoeuvre de la Réserve fédérale. D'un côté, la croissance devrait ralentir et, de l'autre, l'inflation devrait rester élevée. Au final, nous pensons que la Réserve fédérale ne pourra pas monter ses taux d'intérêt plus de quatre fois dans le courant de cette année. Quoi qu'il en soit, les marchés resteront vraisemblablement volatils tant que l'inflation ne se sera pas significativement repliée, c'est-à-dire vraisemblablement pas avant cet été, lorsque nous anticipons une inflation inférieure à 5%. Le débat sur la politique monétaire américaine a naturellement eu un impact sur les taux d'intérêt. Aux États-Unis, les taux d'intérêt sur les titres du Trésor américain se sont vivement redressés. Le taux à 2 ans, qui est le plus sensible à la politique monétaire, a bondi de 40 points de base. Le taux à 10 ans, dans son sillage, a augmenté de 26 points de base et, enfin, les taux européens ont été également sensibles à la remontée des taux américains. Ils se sont redressés, comme en témoigne la remontée du taux d'intérêt en Allemagne de 14 points de base, à près de 0% en fin de mois.
Deuxième point, les évolutions observées et attendues en matière de croissance et d'inflation. Nous continuons de tabler sur un ralentissement tendanciel de l'économie. La plupart des économies retrouveraient leur rythme potentiel à l'horizon 2023, mais dans un environnement où l'inflation devrait se stabiliser à un niveau plus élevé que ce qui est attendu à l'échelle mondiale. En Chine, l'épidémie d'Omicron complique la dynamique conjoncturelle au premier trimestre. Les autorités ont durci d'un cran les règles de distanciation sociale, ce qui freine la mobilité sociale, ce qui pèse sur la consommation des services. Aux États-Unis, la croissance américaine au quatrième trimestre a été particulièrement vigoureuse, mais a été tirée par un phénomène de restockage des entreprises particulièrement marqué. Or, cette tendance au restockage des entreprises est par nature temporaire. Il vise avant tout à stabiliser les chaînes logistiques, à faire face aux contraintes d'offre liées aux goulets d'étranglement. Et tout cela, on le sait, est temporaire, de sorte qu'on pourrait avoir un ralentissement assez marqué dès le premier trimestre de cette année. Alors n'oublions pas, aux États-Unis, que le vrai moteur de la croissance, c'est la consommation des ménages américains. Les ménages américains continuent de bénéficier de la revalorisation de leurs patrimoines financiers et réels. Mais en revanche, ils subissent des pertes de pouvoir d'achat. Les salaires augmentent, certes, mais ils augmentent moins vite que l'inflation. En fait, selon nous, ce qu'il faut bien comprendre, c'est que la croissance devrait ralentir à l'horizon 2023 et que les pressions inflationnistes devraient persister plus que ce qui est attendu à l'échelle mondiale. Et, dans ces conditions, les banques centrales vont être sous pression. Les pressions haussières sur les prix, pour l’heure résultent de chocs d'offre sur les prix des matières premières sur les prix des denrées alimentaires contre lesquelles les banques centrales ne peuvent rien faire. En revanche, les banques centrales ont toutes les raisons de réagir quand les hausses de prix finissent par engendrer des hausses de salaires, comme on le voit par exemple aux États-Unis, ou comme on commence à le voir dans certains pays européens, dans les pays nordiques ou aussi en Allemagne.
Troisième point, les événements politiques ou géopolitiques ont également marqué le mois de janvier.
Sur le plan géopolitique, on a naturellement en tête les tensions croissantes entre la Russie et l'Ukraine avec les menaces d'invasion. Ces tensions ont tiré à la hausse le prix du pétrole, qui a bondi de plus de 15% sur le mois. Nous tablons sur une désescalade graduelle de ces tensions, en lien avec les efforts diplomatiques déployés. En cas de conflit, il y aurait des mesures de rétorsion financière de la plupart des pays de l'OTAN vis-à-vis de la Russie, mais, selon nous, elles auraient un impact assez limité sur l'économie russe, sauf à considérer que la Russie stoppe ses ventes de gaz à l'Europe, ce qui serait, par ailleurs, un coup particulièrement dur porté aux pays européens.
Dans un tout autre registre, les élections présidentielles en Italie se terminent sur une note de continuité. Le mois avait commencé avec des tensions sur les emprunts d'État italiens en lien avec l'approche de ces élections présidentielles et, en définitive, la réélection du président Mattarella dans ses fonctions, permet la continuité. Elle permet en particulier à Mario Draghi de rester Premier ministre, ce qui rassure les investisseurs, puisque c'est le gage ou la promesse implicite du maintien d'une politique de réformes structurelles et également une promesse d'utiliser à bon escient les fonds octroyés par l'Europe.
Dans ces conditions, comment les actifs à risque ont-ils réagi ?
La remontée des taux d'intérêt a provoqué une correction assez marquée du côté des valeurs technologiques américaines, de sorte qu'on a connu un épisode de volatilité et toutes les Bourses ont fini dans le rouge, à l'exception de la Bourse de Hong Kong.
Du côté des entreprises, la saison des résultats du quatrième trimestre est en cours et montre une détérioration des perspectives sur le premier trimestre en lien avec la vague d’Omicron et en lien également avec les pressions inflationnistes persistantes.
Enfin, on notera que les obligations d'entreprises ont plutôt bien résisté à la remontée des taux d'intérêt. Ceci s'explique par le niveau élevé de liquidités dans les bilans des entreprises, par les revenus élevés qui permettent de compenser la pression baissière sur les marges qui va se manifester avec les pressions inflationnistes.
Quelles conclusions en matière d'allocation d'actifs ?
Nous ne pensons pas que la correction récente soit achevée. Autrement dit, il est encore trop tôt pour dire que les valorisations actuelles offrent des points d'entrée intéressants. Nous restons particulièrement vigilants et prudents en matière d'allocation d'actifs.
Sur les marchés de taux d'intérêt, nous restons positionnés pour tirer parti de la poursuite de la remontée des taux d'intérêt sur les emprunts d'État et nous avons réduit notre exposition aux obligations d'entreprises.
Du côté des marchés d'actions, nous restons globalement neutres. Nous continuons de privilégier les titres "value", c'est-à-dire les titres des valeurs décotées par rapport à leurs propres fondamentaux, et nous conservons un biais géographique favorable à l'Europe et au Japon.
Merci de votre attention et rendez-vous le mois prochain.
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